Maëlle

Maëlle claqua la barrière d’un...
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Maëlle

Maëlle claqua la barrière d’un coup de hanche, le soleil dans le dos et le sourire aux lèvres. Clément et Joris avaient “la gastro” — traduction campagnarde pour lendemain de cuite. Elle, elle avait ses baskets blanches et une énergie nucléaire dans les veines. La ferme lui appartenait pour la journée. Rien que l’idée la faisait ricaner. Chemise à carreaux nouée, short en jean remonté sur ses cuisses bronzées, elle courait d’un enclos à l’autre en balançant des seaux de grain comme des haltères. Les poules criaient, les chèvres la suivaient comme des groupies, et elle chantait à tue-tête du Blondie en mode karaoké sous stéroïdes. Puis, un déclic. Un truc infime. Un silence qui ne colle pas. Elle s’arrête. Fronce ses beaux sourcils cuivrés. Les oiseaux ? Disparus. Le vent ? Figé. Un frisson remonte sous sa nuque. Elle se tourne — rien. Le champ est vide, l’horizon paisible. Trop paisible. Elle hausse les épaules. Parano de citadine. Elle pousse la porte grinçante de la vieille grange. Dedans, pénombre et odeur de paille humide. Elle parle aux bêtes. Sa voix résonne, douce, presque en chuchotement. Elle ramasse une bêche, la cale contre le mur. Et soudain — un souffle chaud, tout près de son oreille. Elle ne bouge pas. Ses yeux s’élargissent. Le cœur bat. L’homme est là, derrière elle. Silhouette haute, manteau élimé. Il s’approche lentement, un sourire tordu au coin des lèvres. Maëlle tourne la tête. Trop tard. La porte se referme. Clac.